Bourse/Finance
Bourse : un printemps positif, mais explorons les nuances
Les grands indices boursiers mondiaux ont connu un net rebond au mois de mai. Mais cette embellie cache des déséquilibres structurels : concentration extrême des performances, bulles sectorielles, divergences géographiques. Pour les investisseurs, le risque est de suivre la hausse… les yeux fermés.
Mai en vert, mais peu d’élus
Mai 2025 a donné le sourire aux marchés. Le Stoxx Europe 600 a pris +3 %, le CAC 40 +2,9 %, tandis que le Nasdaq 100 a grimpé de près de 4 %. Une progression qui tranche avec la prudence du début d’année, marquée par la remontée des taux et les tensions géopolitiques.
Mais à y regarder de plus près, la dynamique reste très concentrée. Aux États-Unis, les fameuses "Magnificent Seven" (Apple, Microsoft, Amazon, Alphabet, Meta, Nvidia et Tesla) continuent de représenter l’essentiel de la performance du S&P 500. Selon une étude de Goldman Sachs, ces sept valeurs concentrent près de 35 % de la capitalisation totale de l’indice et ont généré 70 % de sa performance depuis janvier.
Même constat en Europe : la bonne tenue du Stoxx 600 repose sur une poignée de valeurs industrielles allemandes, de groupes de luxe français et de banques bien exposées à la reprise des taux. Le reste du marché, notamment les petites et moyennes capitalisations, reste à la traîne. C’est le cas du CAC Mid & Small, en repli de -1,2 % sur le mois.
Des signaux de fragilité sous-jacents
Le rebond actuel repose en partie sur l’anticipation d’une baisse des taux en zone euro (attendue pour septembre) et aux États-Unis (probable en fin d’année). Mais ces mouvements restent conditionnés à la stabilisation de l’inflation et à la tenue de la croissance mondiale. Or, l’économie chinoise donne de nouveaux signes de faiblesse, avec une baisse inattendue des exportations (-3,6 % en avril) et un immobilier encore sous pression.
En parallèle, certains secteurs commencent à afficher des valorisations excessives, en particulier dans la tech américaine. Le PER moyen du Nasdaq 100 dépasse à nouveau 32 fois les bénéfices attendus, contre 24 fois en moyenne sur dix ans. Des niveaux qui rappellent les excès de 2021.
Les flux de capitaux eux-mêmes révèlent une recomposition de la psychologie des investisseurs : les fonds monétaires et les ETF obligataires restent très demandés, alors que les flux vers les actions sont plus timides. Les gérants privilégient la prudence, en attendant des signaux plus clairs sur l’atterrissage économique global.
Pour les investisseurs : vigilance et diversification s’imposent
Dans ce contexte, il est tentant de suivre la hausse des marchés par mimétisme. Mais les professionnels appellent à un discernement accru. D’une part, la dispersion des performances est telle que les indices ne reflètent plus vraiment l’état moyen des entreprises. D’autre part, la concentration sur quelques méga-valeurs accroît le risque de retournement brutal en cas de mauvaise nouvelle (résultats, régulation, pression fiscale…).
Les opportunités existent pourtant :
– certaines valeurs industrielles européennes sont encore décotées ;
– les small caps reviennent progressivement en grâce (voir étude Lazard) ;
– le segment obligataire de qualité redevient attractif avec des rendements nets réels positifs.
La clé ? Rester exposé au marché, mais de façon diversifiée et dynamique : panacher les zones géographiques, équilibrer les secteurs, intégrer une part de gestion active ou thématique pour capter les poches de croissance.
La hausse de mai n’est pas illusoire, mais elle n’est pas non plus généralisée. Pour les investisseurs, c’est moins le moment d’accélérer… que d’ajuster intelligemment.