Fiscalité
04/02/25
Logements vacants et résidences secondaires : vers une nouvelle régulation ?
Un nouveau texte pourrait bouleverser le droit de propriété en France. Une proposition de loi (PPL) vise à limiter l’essor des logements inoccupés et des résidences secondaires dans les zones tendues. Objectif affiché : libérer du foncier pour les habitants permanents et lutter contre l’explosion des prix immobiliers.
Taxer plus lourdement les logements vacants
Les auteurs de la PPL dénoncent l’augmentation du nombre de logements inoccupés dans les grandes métropoles et les zones touristiques. À Paris, 7 000 logements deviennent vacants chaque année, asséchant l’offre locative et contribuant à la perte de 8 000 résidences principales par an.
Pour inverser la tendance, le texte prévoit de tripler les taxes sur les résidences secondaires et les logements vacants. Aujourd’hui jugées trop faibles, ces taxes n’auraient eu aucun effet dissuasif. Désormais, les maires pourraient relever ces prélèvements sans être contraints d’augmenter simultanément la taxe foncière, un frein actuel à leur action.
Restreindre l’achat de résidences secondaires
Autre mesure radicale : interdire aux propriétaires de posséder une résidence secondaire dans la même commune que leur résidence principale. Seules les nouvelles acquisitions seraient concernées, et les maires des zones tendues pourraient s’opposer à l’achat de nouvelles résidences secondaires.
L’idée s’inspire de la législation suisse, où certaines communes limitent strictement le nombre de résidences secondaires pour préserver le marché local. À Paris, certains arrondissements comme le 7ᵉ et le 8ᵉ affichent déjà des taux de résidences secondaires supérieurs à 35 %.
Le texte propose aussi de donner aux collectivités la possibilité d’inscrire dans leur Plan Local d’Urbanisme (PLU) des restrictions sur la transformation de résidences principales en résidences secondaires, une option inexistante aujourd’hui dans le droit français.
Encourager la rénovation des logements vacants
Un autre levier de lutte contre la vacance concerne la rénovation énergétique. De nombreux logements restent inoccupés faute d’être aux normes. Le projet de loi propose donc d’augmenter le budget des aides à la rénovation, notamment celles de l’Agence nationale de l’habitat (Anah).
Aujourd’hui, les plafonds de travaux éligibles sont limités à 25 000 euros, alors que la mise aux normes des logements énergivores (étiquettes F et G) peut facilement dépasser 50 000 euros. La PPL suggère de financer cette revalorisation en augmentant les droits de mutation sur les biens les plus chers :
• +1 % au-delà de 8 000 €/m²
• +3 % au-delà de 10 000 €/m²
• +6 % au-delà de 12 000 €/m²
Les recettes ainsi générées alimenteraient les caisses de l’Anah pour financer la rénovation des logements vétustes.
Une proposition explosive pour le droit de propriété
Si ce projet vise à répondre à une crise du logement qui s’aggrave dans les zones tendues, il risque aussi d’alimenter un vif débat juridique. La limitation de l’achat de résidences secondaires et la hausse de la fiscalité pourraient être contestées sur le terrain du droit de propriété, un principe protégé par la Constitution.
En l’état, cette proposition de loi devra convaincre au-delà de la seule majorité municipale parisienne. Son adoption nécessitera un large consensus parlementaire et pourrait être soumise à l’examen du Conseil constitutionnel. Une bataille politique et juridique se profile donc autour de ce texte qui pourrait profondément remodeler le marché immobilier français.